Une fois n’est pas coutume, j’ai décidé d’écrire un article un poil plus objectif et factuel que mes précédents. Non, parce que écrire des trucs gras et irrespectueux, c’est à la portée de n’importe qui. Mais écrire des tirades techniques, rentrer dans des détails et noyer le lecteur dans le brouet indigeste d’une analyse poussée, c’est chiant puissance mille et camoufle parfois des errements sous une logorrhée verbale (plus communément appelée : championnat de branlette intellectuelle. Avec de très belles écuries en France, comme celles de Lordon, BHL, Attali ou même de Zemmour). Autant couper la poire en deux et être gras et technique, comme un patron de Mc Donald.
Aujourd’hui on va faire un petit focus sur un épiphénomène du monde des conventions manga. Une conv’, avec ce gout bizarrement savoureux de bouts de chandelles rafistolés à l’arrache à l’instar de sa programmation, et l’angoisse constante de devoir sortir d’une pièce le temps d’une pause pour y revenir et soudainement se bouffer le différentiel olfactif dans les nasaux (avec son kaléidoscope d’odeurs de sueur rances), est un hybride mal bâtit entre une petite foire des fantasmes puérils que l’on peut avoir au sujet du Japon et une manifestation collective du syndrome de Peter Pan. L’occasion pour nous de rouvrir notre coffre à jouets et souvenirs d’enfance, et d’échanger sur des sujets d’intérêt quasi-nul pour la marche de l’humanité. Hélas, certains se paument en chemin et se retrouvent à 30 ans à arborer des peluches My Little Poney. Gros Malaise.
Les jeunesses perdues qui se sont égarées dans les méandres de ces occupations virtuelles stériles n’ont probablement pas été révulsées autant que moi par ce consternant spectacle, sans doute accaparés par la sortie française du film de Sword Art Online, ou plus probablement la lecture d’un énième shônen à l’histoire lamentable. Oh les horreurs ne manquent pas dans ce genre de rassemblements et les produits dérivés surfant sur ces vagues d’immondices sont foisons. Et parmi la quincaillerie qui fait briller les yeux des pigeons de ce genre de grand-messe, une catégorie s’élève au-dessus des autres, se payant le luxe d’être prodigieusement chère, inutile, et impossible à caser de manière crédible dans une maison même dans des chiottes : Je veux bien sur parler des incontournables ventes de Katana, Ninjato, Shuriken, Saï, Tanto et autres Wakisashi. Les répliques d’armes blanches japonaises font en effet partie des symboles d’une certaine vision de la culture japonaise, véritables étendards qui permettent d’identifier rapidement le groupe de débiles profonds auquel on appartient : ceux qui vont saccager leur salon en y foutant au mur une lame immonde aussi esthétique qu’une portière de Renault 21 gris métallisée. Un Katana dans une pièce blindée de meubles occidentaux, avec les couleurs et les objets qui sont propres à notre style d’habitation, c’est comme si on foutait un fœtus dans un bocal en plein milieu d’une salle à manger : c’est bizarrement à la bonne place tant que personne ne se trouve dans la pièce (équation simple pour ceux qui manquent de cartésianisme : viande morte + bocal=salle à manger).
La vente de ces répliques reste il est vrai secondaire, eut égard au prix relativement conséquent par rapport au portefeuille moyen des fans de manga (si on se concentre sur la forte portion d’adolescents/étudiants, qui ne roulent donc pas forcément sur l’or), et aussi heureusement parce qu’une part importante de ce public tient à sa dignité (tant qu’à foutre un truc original, moi je partirais plus sur une tronçonneuse Husqvarna en trophée au-dessus de mon meuble télé mais bon). Les pentacles tracés au sang de cochon d’inde égorgés d’un San Lee toujours prompt à invoquer le Mâlin pour provoquer une malédiction à base de furoncle purulents dans le sphincter des bouseux qui passent devant le stand sans acheter le moindre article, et arborent fièrement leur gratte-croûtes de-dos estampillé « katana » n’y sont pas pour rien. Cette Bande de rebus de limaces qui fielleusement dépensent la totalité de leurs oboles dans des bâtons de métal ayant encore moins de noblesse qu’un pied de biche ne méritent pas mieux !
Mais pourquoi ce genre de commerce fonctionne-t-il malgré tout alors ? Simplement parce que encore une fois, la pop culture et le consumérisme, ça n’a pas son pareil pour faire passer des vessies pour des lanternes. La star de ces ventes, le Katana, passe pour être une arme à la fois esthétique, racée, et dont le tranchant n’a aucun égal à travers la planète. Le nec plus ultra de l’arme blanche moyenâgeuse. Un truc cool quoi. Ben voyons, et la marmotte se fourre le mochi dans le fondement sans vaseline. Bref rappel historique, le Katana est, n’en déplaise aux incultes enthousiastes, une arme aussi techniquement complexe que pourrie. Oui la technique de cinglage est exceptionnelle, oui les artisans Japonais avaient fait preuve d’une ingéniosité formidable en pondant cet incroyable équilibre d’acier à la fois souple et dur. Oui ça pouvait couper à travers un homme comme le couperet dans le cou grassouillet de Louis VXI.
Mais ça restera à jamais une arme de merde, avec performances théoriques exceptionnelles, comme le Desert Eagle, le F-35 ou Moundir.
Le Katana est, hérésie de la création, une épée courte à deux mains. Impossible donc de s’équiper d’une protection supplémentaire tel un bouclier (blablabla pour ceux qui vont me ramener « meuh Musashi Miyamoto et sa technique à une main ». Le mec est une légende dans tous les sens du terme : difficile de vraiment discerner la vérité et les bobards à son sujet.). De plus, il était dangereux pour l’arme d’essayer de parer des attaques, au risque de voir le fil de la lame s’ébrécher rapidement, ou de voir cette dernière se briser. Le katana était de facto une arme de coup décisif : si l’attaque foirait, vous vous retrouviez à offrir bien généreusement votre couenne à l’adversaire qui n’avait plus qu’à vous tailler un deuxième sphincter les yeux fermés. Après c’est sûr que comme il n’y avait que les Samouraï survivants pour en parler, c’était forcément la crème des badass. Ou pour être plus terre à terre, quasiment aucun blaireau parmi la caste n’avait recourt à cette arme, qui revêtait plus un caractère honorifique, ou servait à tabasser et réduire en filet mignon les civils récalcitrants. D’ailleurs, quand on regarde la longueur ridicule du katana (environ 60 cm), les Naginata ou Yari étaient largement plus létales et efficaces lors des batailles rangées ou contre ces culs-terreux de paysans. C’était par contre l’arme parfaite des charges « banzaï », quand on voulait en terminer avec cette bataille de merde qui commençait sérieusement à nous taper sur le système (on a d’ailleurs célébré récemment les 11 ans de la variante occidentale, le Leeroy Jenkins. Mazette que le temps passe vite).
Et puis les armures japonaises, à base de bikinis avec soutien-gorge en acier, minijupes scandaleuses, et couleurs saturées, comment dire… Même un adversaire armé d’un Gillette Sensor Excel serait une menace sérieuse. Pour être plus sérieux, si les armures Japonaises (comme les ô-yoroi des samouraïs) étaient des chefs d’œuvres d’esthétisme, leurs protections étaient des plus sommaires face à des attaques contondantes ou perçantes. Une armure occidentale n’offrait pas forcément beaucoup plus de protection face à des attaques d’estoc, des carreaux d’arbalètes ou des flèches, mais faisaient le boulot face aux tranchants d’épées, haches et autres morgenstern (par contre, le corps, en dessous, douillait sa race, étant donné que si le tranchant est généralement stoppé par la protection, l’onde de choc de l’impact l’est beaucoup moins. On se coupait littéralement avec sa propre armure, quand cette dernière se déformait et vous rentrait dans l’épiderme. Vous pouvez chez vous tenter l’expérience avec un gros parpaing et des chaussures de sécurité avec une coque en acier. Ca ressemblera une tentative de pizza quatre fromage, ou à un point of view amateur du Journal de la Santé de France 5.
Le Katana, ou plus précisément la lame du katana, ne devait ses propriétés qu’à la situation géologique du Japon : l’archipel ne dispose que de peu de ressources en minerais de fer dans son sous-sol. Les armuriers Japonais ne pouvaient donc pas se permettre l’ajout de protections en acier aussi imposantes que leurs confrères européens. Les lames des armes Japonaises ne rencontraient que des armures faites en lin, coton, cuir dur, et parfois quelques renforts en or ou en cuivre, mais assez rarement en acier. Autrement dit des armures légères, et facile à pénétrer pour peu qu’on était capable de forger une lame favorisant les coups tranchants, et ne demandant pas un cœur de lame trop rigide pour les coups d’estoc (ces derniers pouvaient fonctionner avec à peu près n’importe quelle arme à pointe sur les armures japonaises.). D’où l’idée (ingénue, certes) d’opter pour une lame en acier composite à tranchant très dur et au cœur souple.
Après avoir craché mon pus sur le Katana, je devrais normalement faire l’éloge de nos épées batardes occidentales, moins affutées et tranchantes mais beaucoup plus résistantes aux coups, parfaitement maniables à une main, et tout à fait capables d’être utilisées comme armes contondantes avec une paume solide. Et bah je n’irais pas au-delà, car ce serait être en incohérence totale avec mon propos initial concernant l’achat de ce genre de babioles : peu importe l’origine, le type, la finition : avoir une épée même Japonaise en 2017 quand on plus de 13 ans, pardon mais c’est une faute de mauvais gout qui frise à la déchéance d’humanité irrévocable : la preuve, les seuls cons qui utilisent des armes blanches dans nos sociétés occidentales sont les castors juniors du terrorisme, entre deux rodéos de camion et un sac de clous remplis de pétards. Et papy quand il veut couper un sifflard ou s’arracher un cal avec son opinel.
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Lexique super utile
Katana : grosse machette japonaise
Ninjato : moyenne machette japonaise. Pour ninja.
Shuriken : variante japonaise du jeu de fléchette avec des handspinners pointus.
Saï : brochette de barbecue utilisée par des tortues mutantes pour couper des pizzas. Cowabunga.
Tanto : couteau à sifflard
Wakisashi : mi-grosse-mi-moyenne-mi-petite machette japonaise
Yari : grosse machette japonaise au bout d’une lance. Et arme effectivement assez cool, comme le pilum romain ou une arme d’hast (vouge)
Morgenstern : bilboquet du chaos
Sword Art Online Ordinal Scale : Love Hina avec un casque de réalité virtuelle.
Ô-yoroi : tenue de CRS médiéval japonais.
Tronçonneuse Husqvarna : VRRRROOOOAAAAA*brumbrumbrum*VROOOOAAAAAAARRR.